6 DÉCEMBRE SAINT NICOLAS
La rêche bure et le bâton, un quignon sec pour tout repas, des traits émaciés sous teint pâle et point de sandales à ses pieds… Stop ! Qu’allez-vous imaginer ? Non ! Un pèlerin de l’Avent… Comment pourrais-je l’expliquer en condensant au maximum ? Eh bien ! Pronominalement, c’est d’abord vous, elle et lui, toi, eux, nous tous, autant que nous sommes ! En jeans troué, en robe longue, en complet-cravate ou training, dans la cuisine, sur un chantier, au bureau… bref ! Où en étais-je ? Ainsi donc en ce matin-là, pèlerin peu conventionnel, j’ai sauté hors mon lit douillet, enfilé – « zip ! » - mon jeans à fleurs, et couru ouvrir le carreau, sixième à mon calen… Sans blague ! Il était vide ! Point d’anges. Pas de bougie. Personne… qu’un gros trou. J’ai froncé les sourcils, repoussé le battant et tout recommencé : Non ! C’est un peu gros ! Inventons plutôt que, sur la pointe des pieds pour ne pas m’éveiller, il s’était échappé dans l’auguste dessein d’accomplir sa mission : couvrir de récompenses les enfants très, TRÈS sages ! « Et moi, dans cette histoire ? » Alors j’ai réfléchi : Saint Nicolas tout court, je n’ai rien contre lui. Si j’en crois sa légende il serait, comme on dit, un sacré thaumaturge : ressusciter des gosses ! Trois d’un coup, c’est fortiche ! Néanmoins le créneau par lequel « Dieu sait qui » l’oblige à cheminer tout au long de l’Avent m’apparaît coupe-gorge ! Qu’il offre des biscômes aux enfants du quartier pour voir leurs blonds minois colorier la rue… là j’applaudis, je bisse ! Mais – sinistre trouvaille – qu’on l’ait acoquiné, sans qu’il sache pourquoi, à ce Père Fouettard agitant sous le nez des gamins turbulents son gros paquet de verges, prélude à la fessée… Pardon si je dis « pouce ! » Il faudra me convaincre ! « Mais ! C’est juste pour rire ! Histoir’ de leur fair’ peur ! » … ainsi, je dramatise … Enfant d’un demi-siècle je ne porte pas moins, fourrés au cœur l’âme, les pernicieux décrets d’équations légalistes aggravant mon esprit de terrifiants constats extraits d’une racine humaine et… souterraine, car quasi infernale : « T’es gentil, t’as gagné : t’auras ta récompense ! » « T’es méchant, t’as perdu : t’auras droit à la verge ! » Fort simple et efficace, la loi portait ses fruits de plus en plus amers lorsqu’on y cumulait papa, maman, bon Dieu… même petit Jésus ! « Fi donc, méchant garçon ! Tu t’es pincé les doigts… P’tit Jésus t’a puni ! » « Si tu étais gentille, tu n’serais pas tombée ! T’as fâché le bon Dieu et c’est ta punition ! » …patati patata. Amen. Alléluia … Rigole qui voudra, qu’importe… c’était dit ! Pire ! On le sert encore : sirupeux, pimenté, suivant qu’il est « chrétien » de déguiser bon Dieu en gendarme rougeaud ou en croque-mitaine.
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