Noël / Pèlerin de l'Avent /

5 DÉCEMBRE HISTOIRES D'ANGES

Publié le 03/02/2025 par Modotre
Le premier me guettait – une fois n’est pas deux ! – bien sagement campé dans l’embrasure « cinq » de sa fenêtre claire. Imprimée en couleurs au recto gris spatial de son nouveau chandail, une oblongue fusée attestait aux Terriens sa céleste origine : tombé du Paradis !
Dans ses mains barbouillées du « fluo » éclatant d’un arc-en-fleur d’hiver qu’avait brossé, la veille, l’encre de ses stylos, il serrait, recueilli, son fabuleux trésor : vieux coffret de carton écorné sans répit par ses dix doigts fiévreux fatiguant l’ouverture, au gré d’inventoriages ardemment vérifiés…
« … un si précieux magot !
   ne faudrait pas le perdre ! »

Lorsque je l’ai assis sur mes genoux câlins, bien vite il a senti que mes paumes gercées étaient froides à son cou. Pour l’amuser, j’ai dit :
« Soulève un peu tes ailes ! J’y glisserai mes mains et tu les chaufferas ! »
Comme s’il estimait mon truc inefficace, il braqua dans les miens ses yeux verts d’espérance et, d’un ton péremptoire exigeant soumission, il coupa mon élan :
« Non ! Attends, grand-maman ! J’vais te donner « quéchose » ! »
Alors, tel au printemps d’une éclosion magique, j’ai vu ses doigts-pétales imprégnés de couleurs, s’entrouvrir un à un sur la boîte à secrets pour en faire jouer, gravement, sûrement, le sésame sacré et en retirer… quoi ?
… Une ronde noisette, happée aux écureuils
- « Si tu la veux, je te la donne !
donner, tu sais, c’est pour toujours ! » -
qu’il fourra dans ma bouche avant de me prescrire :
« Tu la mâches ! Tu l’avales ! Après, t’auras plus froid ! »

Petit Yoan, petit Yoan ! Merci pour ta noisette, collante à n’y pas croire ! Allégeant ton trésor elle enrichit le mien, lorsqu’en poussière d’ange à mes veines transies, elle offrit sa chaleur.
Bonhomme de trois ans atterri parmi nous
… entre rire entre larmes,
... tendresse et gronderies
j’ai toujours deviné, pointant sous le verso de ton tricot spatial, deux ailes bariolées aux tons chauds d’arc-en-ciel…
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Le second que j'ai vu, tiens donc ! il était chauve ou du moins aux trois quarts. Fine auréole blanche, seuls ses rares cheveux trahissaient son grand âge à mes yeux mais... qu'importe !
Assis sur le banc vert avoisinant l'abri du marchand de marrons, il pelait des châtaignes avec application, s'attardant à gratter jusqu'aux infimes miettes, la beige pellicule y demeurant soudée. Puis, ange incognito toutes ailes repliées, il les coupait en deux pour les glisser, tiédies, dans le bec entrouvert d'une enfant de cent ans qui, vis-à-vis de lui sous un chapeau râpé, semblait presqu'endormie dans son fauteuil roulant.
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Or, même s'il n'a pas surgi en vol-plané, j'ai tôt fait de saisir, à son pas décidé dans la banque envahie, que le suivant pour sûr devait être pressé. Et l'attente au guichet qui n'en finissait pas ! Lorsqu'arriva son tour - « ben ça n'est pas trop tôt » - et qu'un poupon hurla dans son landeau-prison, je l'entendis offrir d'une voix angélique, sa place à la maman du bébé irascible :
« Et puis c'est quoi, au juste ? Question de deux minutes ! »
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L'ange numéro quatre...
Pèlerin de l'Avent,
au fait :
si c'était... toi !

Marie-Claude Pellerin
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