22 DÉCEMBRE PETITE HISTOIRE DE PORTE...
À l’âge où j’alignais toutes rondes les billes aux tringles du boulier pour apprendre à compter, je récitais – « facile ! » - les numéros par cœur jusqu’à cinquante… au moins ! En revanche les lire – car écrits en arabe aux dires de mes frères – s’avérait à mes yeux de gosse de cinq ans, tout aussi périlleux que la résolution d’un rébus en chinois ! Dès lors, rien d’étonnant qu’en face des carreaux de mon calendrier, ma mine s’engrimace : tous ! ils se ressemblaient !… sauf en leur gribouillis, censé me désigner le favori du jour ! Têtue en ce temps-là et de surcroît « p'tit’ sœur » de deux aînés moqueurs, j’avais, pour aggraver ma fâcheuse ignorance, cette insigne fierté de ne solliciter aucune aide entraînant ce narquois quolibet : « Elle est analpha-bête ! » Ainsi donc – « am-stram-gram » - c’est au petit bonheur que j’ouvrais, polyglotte, les fenêtres arabes et chinoises à la fois ! Qu’ « un » devienne « dix-sept » et « douze » « vingt-et-un » ne m’incommodait guère, du moment qu’angelots, ânes gris et agneaux n’éclataient pas de rire ! Cependant fréquemment, et afin de soigner mon image « intello », j’allais me pavaner sous les calendriers de la chambre des grands, pour pointer mon index pile en leur beau milieu où, parmi les carreaux, un seul était, miracle ! une porte s’ouvrant à deux larges battants qui, sauvant mon honneur, me permettait ainsi de la leur désigner et d’affirmer, savante : « Celle ci c’est la vingt-quatre ! Faut l’ouvrir en dernier autrement c’est d’la triche ! »
Savourant mon succès, je retournais alors au nid de ma chambrette où MA… porte vingt-quatre, hermétique, attendait ! « Et si je guignais juste, en soulevant le coin ! Malheureuse ! Fais pas ça ! C’est vilain de tricher ! » Avec tout le recul imposé par les ans, je me dis aujourd’hui que j’aurais dû sortir et m’ébattre au jardin pour changer de décor. Non ! Au lieu de cela, avide je fixais, à m’en user les yeux, l’huis de la tentation ! C’est pieds nus un matin, afin d’atténuer les craquements témoins de mon plancher disjoint, qu’à petits pas fautifs sur jambes en coton, j’ai marché tête basse jusqu’à… « …et si ça brûle ! Si ça fait un gros « bouh ! ». Sans frapper ni attendre j’ai forcé, ô ! mon Dieu ! la porte de l’Étable où m’a souri l’Enfant, éveillé par mes pas.Sans un mot Il m’a dit, du clair de Son regard : « Entre donc, assieds-toi ! nous mangerons ensemble ! » Après tous mes Avents où curieuse je guigne encore un peu… souvent… sous la porte vingt-quatre à mon calendrier, me revient en mémoire ô mon Dieu ! chaque fois, cet appel en supplique de Votre Fils aîné, fixant passionnément, à S’en user les yeux,l’huis de nos cœurs fermés sans jamais les forcer… « Car voici : je me tiens à la porte et… je frappe ! » … pareil à un mendiant,sans domicile fixe ! Aux jours d’agitation précédant Sa naissance, oserais-je, ô ! mon Dieu ! souffler à Votre Fils : « Frappez encor', Seigneur !oui, de grâce frappez un tantinet plus fort… ... afin qu'après la fête, aucun petit poète, écœuré, n'ose écrire :
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